Samedi 10 novembre, place Etienne Dolet, 15 heures
Perron de la Mairie, extérieur jour, plan panoramique.
La pluie s’est arrêtée et le sol tapissé de feuilles jaunes brille par endroits.
Trois hommes en kilt vont de groupe en groupe. L’un d’eux fume cigarette sur cigarette. Tout le monde a le sourire.
Mairie, intérieur jour, plan d’ensemble.
L’homme à la cigarette a écrasé son mégot dans le cendrier à droite de la grande porte. Lui c’est Olivier. Il gravit lentement, mais d’un pas décidé, l’escalier en pierre recouvert d’un tapis rouge. La musique s’arrête au milieu du plan. L’homme passe devant la caméra et continue de monter.
Mairie, intérieur jour, gros plan sur la femme vêtue d’une robe longue blanche fendue laissant apparaître au fil de son pas une grande partie de sa jambe.
Elle, c’est Laetitia et comme le chantait Serge : « Sa raison à lui s’est perdue dans ces huit lettres là ». Elle avance doucement et d’une démarche assurée se dirige vers la grande table en verre au bout d’une salle remplie de chaises. Le public est en partie à l’extérieur de la pièce. L’homme debout de dos, Olivier donc, se retourne et d’un signe de la main invite tout le monde à s’approcher. La caméra zoome.
Plan moyen, l’homme et la femme écoutent le maire ceint de son écharpe tricolore. Il leur fait face.
La caméra zoome encore, le couple se regarde longuement. Laetitia et Olivier s’embrassent. Tout le monde applaudit. Ils viennent de dire oui.
Extérieur jour, plan large en plongée à travers des branches de grands arbres, encore habillées par quelques feuilles jaune d’or, on devine un énorme chantier, le nouvel équipement de la Maison de la Culture et on entend en voix off :
« On a marié le Boss » !
Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existés n’est pas fortuite.
Le bambou des barques
Vendredi 16 novembre, Le Caveau, rue Edouard Vaillant, 16 heures.
C’est en passant par hasard devant Le Caveau que nous avons décidé de discuter avec Olivier, un autre Olivier. Olivier Clavaud*. Et au Caveau, un établissement de plain-pied avec pignon sur rue, éclairé par le sourire de Jeannine depuis février 1968, nous avons longtemps bavardé. C’est là un bel établissement hors du temps avec son juke-box en panne, son billard couvert de pots de fleurs et ses habitués qui poussent fort la porte à cause de cette fichue gâche de serrure qui accroche mal.
« Il faut prendre le temps de regarder », nous dit l’artiste. Et c’est ce que nous faisons. Donc Olivier est artiste, mais pas seulement. Il est aussi graphiste. Enfin il aime dessiner, peindre. Mais ce n’est pas le dessin qu’il a utilisé pour l’exposition collective dans les marais de Bourges*. Non, dans les marais, il a imposé barque, berceau, instruments de musique… Le tout en bambou, cette étrange graminée avec sa grande tige ligneuse, solide comme un tronc.
Olivier les a fendus en deux les bambous. Un travail, long, fastidieux, exécuté avec un couteau à huitres dans la chaleur de l’été. Puis il a tissé, tressé pour fabriquer ses objets. Des objets qu’il a voulu en relation étroite avec le paysage des marais et les habitudes des maraîchers, mais pas seulement, parce que si la barque réunit les jardiniers, ici, les instruments de musique peuvent apparaître…dissonants. Malgré tout, la musique peut-être un trait d’union.
« Il y a dans cette exposition collective un sens commun, notre quotidien, nos préoccupations… » La barque c’est le passage, c’est un moyen pour s’éloigner mais aussi se rapprocher. C’est comme le dessin. « Le dessin est une manière d’approcher les autres. C’est aussi un vrai passeport ».
Là, je sais qu’Olivier a raison. À peine quelques traits tracés sur le papier et Cathy a déjà sympathisé avec la patronne. Et il n’y a pas encore la couleur. Ah, la couleur ! Olivier connaît. « Quand on sent qu’une couleur plaît aux autres on a tendance à en mettre beaucoup… ». Olivier est généreux et cette générosité apparaît dans les objets qu’il offre à voir chemin de Babylone, non loin du caveau. Et le métissage dont il aime tant parler vient se coller magnifiquement au mot culture.
Le caveau, l’année 1968…. Tout cela me fait penser, en ressortant, à un slogan écrit sur les murs de Censier il y a cinquante ans : il faut systématiquement explorer le hasard.
* http://olivier-clavaud.com/
* http://www.mcbourges.com/images/pdf/flyer-visites-marais.pdf
Vendredi 16 novembre, auditorium, 20 heures.
La journée se termine, le Nouveau Cirque Vietnamien est là et il va transporter le public au cœur d’un conte dessiné par des corps, de la musique et du bambou. Un spectacle circassien mêlant esthétique, acrobaties, chants ancestraux, percussions, contorsions et poésie. Une heure de fascination.
Dans un équilibre parfait, les tableaux chorégraphiés se sont articulés traçant une fascinante et belle écriture onirique. Avec Teh Dar la soirée fut enchantée.
Dessins : Cathy Beauvallet Texte : Dominique Delajot